18 novembre 2015 à 17:01

Roland Christmann: petit arrêt sur un homme de l'ombre

Sauvagement ingrat ou ultra-gratifiant, le poste de gardien de but fait rarement dans la demi-mesure. Roland Christmann, coach adjoint et entraîneur des gardiens au sein du club, aura démontré toute la mesure, de son talent durant toute sa carrière footballistique. C'est à l'âge de 39 ans, dont 33 consacrés au football, que Roland avait tiré sa "révérence" lors d'un derby entre Montbronn et Sarreguemines.

Si bien souvent un attaquant est à l’origine d’une victoire, un gardien de but est souvent à l’origine d’une défaite. Mais lorsque le gardien est en mesure de renverser une situation compromise, se révèle alors le joueur d’exception.

Du panthéon du football lorrain...

Pas de doute. Roland Christmann, à travers ses brillantes prestations, a pris place au panthéon du football lorrain. « Lorsque j’étais cadet à Hochwald, j’ai remplacé au pied levé le gardien de l’équipe fanion qui évoluait en première division. On jouait le maintien à deux partout. Je sors un penalty, relance le ballon et sur la contre-attaque on marque le 3 e but, on gagne finalement 4 buts à 2. Depuis, j’ai toujours été titulaire », se souvient-il.

« Mon dernier match m’avait valu dix jours d’hôpital, puis un mois et demi de congé maladie. J’avais été percuté par un adversaire de Sarreguemines au rein gauche, j’étais resté sur la pelouse alors que je souffrais d’une hémorragie interne. »

Mais ce dont il est le plus fier, c’est qu’il était sorti du terrain debout, son club maintenu en Division d’Honneur. Seulement après, il s’était éclipsé en ambulance, le plus discrètement possible. Il avait un jour été élu meilleur gardien de Lorraine, devenant même celui de sa sélection.

Il était passé par la voix et les mains de Guy Vertig, celui qui avait lancé les Jean-Marie Aubry, Jean-Philippe Nadon, le regretté Philippe Schuth, ou encore Philippe Fluckinger, ce dernier « le couvant de sa gentillesse » alors qu’il n’était que poussin à Merlebach, comme on disait pour débutant à l’époque. Il avait même été repéré un peu plus tard par le FC Metz et avait dû repousser les frappes de François Calderaro, pendant une saison.

« Il était surtout mon modèle dans la vie, m’a donné le chemin à suivre »

« Malheureusement, à dix-huit ans, j’avais plus la tête aux filles qu’à rattraper des ballons avec mes mains », rigole Roland Christmann. Il est désormais depuis longtemps marié avec Tania, Coraline, sa fille de 20 ans, devenant sa première supportrice.

« Comme j’ai vite compris que je ne serai jamais professionnel, j’ai vite cherché un boulot. Quant au foot, si j’ai perdu beaucoup d’argent en refusant certaines offres, j’ai gagné beaucoup de copains. J’aurais pu signer plus haut à Forbach, là où je suis né, mais je pensais ne pas pouvoir tout concilier. »

Il raconte surtout ses premiers pas sur une pelouse, dans les pas de Charles, de six ans son frère aîné. C’était à Merlebach, donc.

« Je le suivais partout, il était attaquant. Il me mettait entre deux poteaux pour se perfectionner. Et l’arrière gauche que j’étais au début était vite devenu gardien de but. Il était surtout mon modèle dans la vie, m’a donné le chemin à suivre. On a même travaillé ensemble. Où il allait, j’allais. »

Il y a douze ans, il avait vécu le pire jour de sa vie, celui du décès de Charles. « Je pense à lui tous les jours, à ce qu’il aurait fait ou pas à ma place. »

Il lui avait un jour publiquement rendu hommage. C’était sur une pelouse évidemment.

Lors d’un match disputé avec Montbronn, sur l’un de ses longs dégagements, le ballon avait terminé dans les filets du but adverse. « J’avais levé les bras et les yeux au ciel, puis je lui avais parlé. »

Durant sa longue carrière, Roland Christmann s’est forgé un palmarès éloquent : « Mes faits d’armes : les deux buts que j’ai marqués sur des dégagements de mes 16 mètres contre Vandœuvre en DH et Nousseviller en DHR. Ou encore face à Raon lorsque je sors un ballon de la lucarne à la 88e et sur la relance on égalise. Et pour l'une de ses dernières rencontrent avec Montbronn, à Creutzwald, un match à six points, j’étais encore blessé, mon remplaçant est expulsé à 10 mn de la fin alors qu’on mène 1 à 0, je rentre, arrête de penalty et on gagne le match. » Il faudrait des prolongations pour égrener tous ses exploits.

Des heurts et des douleurs

Réservé et discret en dehors du terrain, le dernier rempart devient un félin imprévisible et impressionnant dès qu’il pénètre dans sa cage. Emporté par sa fougue, il lui arrive aussi, lors de ses envolées périlleuses, d’y laisser des plumes. « Quelques bosses et cicatrices. Une fracture du zygomatique avec déplacement de la mâchoire et une rupture des ligaments croisés. En Coupe de Lorraine contre Audun-le-Tiche, sur une série de tirs aux buts, je me casse le ménisque. Sa dernière saison en rouge et blanc a aussi été émaillée par une rupture partielle du tendon de l’épaule droite, puis la même blessure à l’épaule gauche cette fois en match, mais j’ai terminé la rencontre », liste-t-il. « Mon arrêt fera deux heureux : ma femme Tania, intendante, infirmière et soutien exceptionnel, toujours à me soigner et m’encourager, ainsi que mon patron. Et une malheureuse, ma fille Coraline, ma plus fervente supportrice », résume Roland Christmann.

C’est René Steiner, l’ex-président de Montbronn, qui sait le persuader de fouler la Neumatt. Puis Gilles Ferstler se chargea de le garder pendant dix ans. Un bail qui fait du gardien un véritable monument du club. « Montbronn est un club hors norme, un public nombreux et fervent, tout un village pour vous pousser, jusqu’au maire. Une équipe de potes soudés. Je suis le dernier témoin d’une génération de gars qui ont marqué le foot régional. Je pense à Fred Ferstler, Damien Steiner, Yannick Sutter, Fabien Grébil, Thierry Conrad et j’en oublie… »

De son passage montbronnois, Roland Christmann laissera le souvenir d’un sportif véhiculant une image d’intégrité, de fidélité, de respect et de dévouement. L’ombre de Roland Christmann planera encore longtemps au-dessus du rectangle vert de la Neumatt. Mais il l’a promis : il viendra encore supporter Montbronn et peut-être qu’un jour s’installera-t-il sur le banc d’entraîneur. Un rêve qu’il caresse secrètement.

...au verte pelouse du championnat de France avec l'USSU !

 Et voilà que depuis 2012, l'USSU a la chance de le compter parmi ses fidèles hommes de l'ombre.

Un modeleur de mains

Il intègre le club et en devient l'entraîneur des gardiens sous l'ère d'Olivier Froemer. La saison suivante, en plus de sa licence de dirigeant, il fît à nouveau une licence joueur, l'odeur des gants en compétition lui manquant très certainement, mais n'avait pas foulé de pelouse. Chose qui arriva la saison dernière...l'habituel entraîneur des gardiens de Sarre-Union depuis 4 saisons maintenant avait en effet dû lâcher du regard ses protégés, face à Belfort, lors de la dernière journée de CFA, il s’était placé entre les poteaux.

C’était un jour particulier, forcément. Gilles Meyer était blessé, Jean-Philippe Mathis, quant à lui, avait été préservé pour pouvoir évoluer en équipe réserve. Alors, Bruno Paterno l’avait titularisé ce 23 mai. Un peu plus de trois mois après son 42e anniversaire.

« J’étais déjà entré deux fois en jeu en CFA, d’abord quand Gilles avait été expulsé. Contre Lyon-Duchère, la saison passée. J’avais encaissé un coup franc extraordinaire, magnifique jusqu’au moment où j’avais pris conscience que c’était moi qui venais de l’encaisser. Cette saison, Gilles s’était rompu le tendon d’Achille à Raon-l’Étape. »

Le match suivant, face à Belfort, le leader incontesté et promis promu en National, Roland Christmann portait le numéro “Un” au dos de son maillot.

Il avait été taquiné par ses jeunes coéquipiers dans le vestiaire. Vianney Schermann, Yann Schneider et Thomas Zerbini, lui trouvant même « un visage un peu plus vieilli depuis le dernier entraînement », lui dont le visage se couvre d’un sourire désormais.

« Franchement, je n’avais pas d’appréhension de plonger ou de me faire mal, mais j’avais la crainte d’être ridicule. Je ne voulais pas commettre les fautes de concentration que je demande d’éviter à mes élèves. En plus, dans le but d’en face, il y avait Yoann Collas que j’avais entraîné une saison à Sarre-Union. Quand il est venu me féliciter à la fin de la rencontre, j’étais heureux. J’étais presque comme un gamin, même si on avait perdu 0-2. »

Celui qui organise quotidiennement le planning de quelque quarante chauffeurs et caristes chez Altrans à Hambach, se raconte peu à peu. En bref, il avait été numéro “Un” quand il jouait à Merlebach, Spicheren, Merlebach (encore), puis Montbronn pendant dix saisons.

 

Un jour de juin 2012, il avait aussi fini par dire oui à Roudy Keller qui voulait l’attirer depuis longtemps devant ses filets.

Il dit se régaler à fréquenter l’Alsace-Bossue et ses habitants, Roland Christmann dit aimer être un professeur sévère pendant les séances, et devenir un copain de ses élèves une fois la douche prise. « Toujours faire les choses à fond », comme le répétait son frère.

Et le modeleur des mains des gardiens de Sarre-Union espère devenir un modèle, à son tour…

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