20 avril 2023 à 18:27

Nizar Mabsout, nouveau manager sportif du club

Changement de cycle en douceur pour l’US Sarre-Union à l’approche de la saison du centenaire : l’entraîneur en charge de la réserve depuis trois ans et demi, Nizar Mabsout, quittera en effet cette fonction à l’issue de l’exercice en cours pour devenir le manager sportif du club de la capitale de l’Alsace Bossue. Loin d’une révolution, il s’agit d’une évolution naturelle, tant pour le club à l’aube d’importants défis que pour un homme qui en est devenu l’une des figures depuis le début de son aventure en Bleu il y a près de dix ans. Ce fédérateur, compétiteur, bosseur aussi hyperactif que réfléchi, s’est reconnu dans les valeurs portées par l’USSU et il faut croire que la réciproque est vraie. À quelques semaines de prendre ses nouvelles fonctions, Nizar Mabsout s’est confié sur son parcours et son attachement au club, sa manière d’appréhender son nouveau rôle et le cycle qui s’ouvre du côté du Stade omnisports.

« Rassembler autour d’un projet qu’on va façonner ensemble »

Enfant de Sarrebourg

Né à Sarrebourg le 12 octobre 1981, Nizar a grandi et fait toutes ses classes, y compris footballistiques, dans sa ville natale – ainsi qu’à l’AS Réding. Ses études à Metz, celles qui lui permettent d’être aujourd’hui professeur d’économie et de gestion en lycée professionnel, l’obligèrent à suspendre un temps ses activités dans le monde du ballon rond.

Il y reviendra, « un peu par hasard », en tant que coach par l’entremise de celui qu’il entraîne aujourd’hui – hasard ? – au sein de l’effectif de la réserve sarre-unionnaise : son petit frère Zakaria. « Il avait repris une équipe de jeunes au FC Sarrebourg et il n’avait pas pu honorer son engagement parce qu’il avait trouvé un travail à Haguenau. J’avais pris le relais pour ne pas laisser les jeunes sans coach », raconte Nizar qui officia à l’école de foot puis dans toutes les catégories jeunes du club fanion sarrebourgeois. « De là, j’ai enchaîné tous les diplômes, en trois ou quatre ans : Certificat fédéral de football 1, 2, 3. »

Suite logique : le Brevet d’entraîneur (BE), passé « un peu par hasard », dit-il encore : « j’étais plus allé voir qu’autre chose comment ça se passait pour l’épreuve et, finalement, j’avais été pris ». Cependant, pour obtenir le BE, « il fallait une équipe de niveau senior ». Cette équipe ne sera pas celle du FC Sarrebourg, où le courant ne passait plus.

Nizar s’engage en effet pour le deuxième club de la cité sud-mosellane, l’Entente franco-turque (EFT), « un club de quartier » dont l’équipe première évoluait en District 1. Il y aura vécu, outre la validation de son BE, un « baptême du feu assez exceptionnel » aux commandes d’un effectif senior :

« Là, c’était la belle histoire parce qu’on a fait un parcours assez exceptionnel : on a battu une équipe de National 3 en Coupe de France, on a battu trois équipes de Régional 1 pour arriver en demi-finale de Coupe de Lorraine, on a gagné la Coupe de Moselle et on est monté ».

Descendre la Sarre pour apprendre dans le foot

Deux ans plus tard, l’EFT vivra une deuxième montée, toujours sous la houlette d’un Nizar Mabsout qui avait parallèlement décidé de s’engager, à trente kilomètres en aval de la Sarre, sur la rive de Bouquenom. « Je faisais les deux : une équipe de jeunes à Sarre-Union et l’équipe senior à Sarrebourg. Plus du futsal ! ».

Sarre-Union, une ville quatre fois plus petite que Sarrebourg mais footballistiquement ancrée en pole position sur toute la longueur de la vallée de la Sarre française et dont l’équipe première naviguait alors, depuis 2011, en CFA, l’actuel National 2. C’était, en cette année 2014, la présidente de la Commission des jeunes de l’USSU, Dominique Weinstein, l’épouse de Laurent, président du club, qui avait, avec succès, sollicité Nizar pour s’occuper de l’école de foot :

« Je voulais voir autre chose, une autre structure. À l’EFT, je coachais mes amis, en quelque sorte. C’était un peu différent même si on a fait de très, très belles choses ; ce n’était pas le même club que l’USSU. C’est pour ça que je suis venu à Sarre-Union : j’avais besoin de voir une autre façon de fonctionner parce que je m’estimais en apprentissage dans le foot ».

Un apprentissage ô combien réussi, puisque, pendant trois saisons (2014-2017), Nizar Mabsout s’occupera avec brio, comme en écho à son initiation au FC Sarrebourg, des différentes catégories de la section jeunes, en tant que responsable de l’école de foot puis coach des U13, U15 et U19, qui finiront champions d’Alsace en Excellence. En trois ans, l’« apprenti » fait ses preuves et établit de franches et solides relations au sein du club, notamment avec le président Weinstein. L’USSU, un club dont l’esprit correspond à la personnalité de son futur manager sportif :

« Oui, vraiment ! Je pense qu’on a ce qu’on mérite, toujours. Si on fait mal les choses, si on se trompe, on se trompe : il faut assumer. Je l’avais vu ici quand le club était descendu de National 2 – j’y étais à ce moment-là. C’est la première fois que j’ai vu dans le foot un club réagir avec autant de calme ; les décisions se prenaient naturellement. Il a fallu sortir un coach, ils l’ont sorti, un autre a pris en cours de route, ils l’ont gardé et lui ont confié les clés, ça ne s’est pas super bien passé mais ils ont assumé. Ils ne font pas tout bien mais ils assument les choses, ils ne se cherchent pas d’excuses. Oui, ça me correspond bien, ça me plaît. C’est une forme de maturité, de constance. »

Tous ces aspects ont également permis à Nizar, lui dont la fin de sa période sarrebourgeoise avait déjà permis de faire évoluer son sens « politique », d’apprendre sur le plan de la cohésion collective : « Ici, se dire les choses à voix haute, brailler un bon coup, ça n’a pas d’incidence sur l’engagement des gens. C’est important, c’est une forme de maturité aussi ». Un peu, finalement, comme dans une famille. Nizar se dit « toujours émerveillé » par l’âme et l’environnement qui font ce club, à commencer par l’indéfectible implication des bénévoles :

« Il y a un vrai engagement des gens de la ville pour ce club. Ce qui me plaît ici, c’est que chacun a sa place. Je n’ai jamais eu de souci. C’est assez incroyable parce que je suis plutôt franc du collier ! Mais ici, ils apprécient ça, du moment que c’est dans le cadre de tes prérogatives et que c’est un avis motivé, discuté ».

Trois ans à évoluer dans les catégories jeunes de l’USSU, trois ans à l’EFT, quatre ans au FC Sarrebourg : Nizar Mabsout avance par cycles qu’on dira grosso modo triennaux. En 2017, il éprouve le « besoin de souffler » et de se mettre en retrait du foot – en l’occurrence, d’une USSU qui n’allait pas tarder à traverser une zone de turbulences. Fin, donc, du premier cycle de Nizar Mabsout à Sarre-Union.

La capacité à prendre du recul pour mieux avancer

Ce besoin de souffler est en réalité tout relatif quand on connaît le bonhomme et sa capacité à courir efficacement plusieurs chevaux à la fois.

En guise de besoin de souffler, il ouvre, avec deux associés, un restaurant – le Notorious Food –, Rue Gambetta à Sarrebourg, spécialisé dans les tacos, considérés aujourd’hui comme les meilleurs de la ville. Après s’y être beaucoup investi au début, il y est moins présent aujourd’hui mais en assure toujours la gestion, la comptabilité et l’administration. Il s’engage également activement, aux côtés de son frère Zakaria, dans Globale, la très dynamique association de danse et culture urbaines des secteurs de Haguenau et Strasbourg.

« J’aime bien être overbooké ! J’aime faire plein de choses en même temps », concède volontiers l’enseignant-coach-formateur-éducateur-restaurateur-acteur associatif qui s’investissait jadis dans l’entreprise de maçonnerie de son père, dont lui vient peut-être sa détermination de bâtisseur qui sait prendre la mesure :

« J’ai besoin de faire des choses, d’être force de proposition, d’avancer, de créer. Je suis calme mais je peux être nerveux ! J’ai surtout beaucoup de distance, de mesure par rapport aux choses. J’aime prendre du recul, même sur moi. Je termine un match, je regarde d’abord ce que j’ai mal fait avant de chercher ce que les autres ont mal fait. J’ai un esprit assez analytique ; je ne sais pas si c’est mon côté prof ! J’aime observer, regarder, comprendre pourquoi les gens font les choses. Je ne suis vraiment pas du genre à faire n’importe quoi. J’aime respecter le cadre. »

Le recul que prend Nizar par rapport au foot en 2017 ne dure que six mois, lorsque l’AS Réding sollicite son ancien minot pour pallier l’urgence chez les U18 :

« On m’avait un peu harcelé pour les reprendre à la suite d’un problème avec un éducateur. J’avais accepté parce que je retrouvais le terrain, ça me manquait déjà un petit peu ! Je leur ai donné un petit coup de main et, de fil en aiguille, je me suis retrouvé à Phalsbourg pour reprendre du service “sérieusement” ».

Il passe un an et demi à la tête de l’équipe première phalsbourgeoise en District 1, jusqu’à la trêve hivernale 2018/2019 et un coup de fil venu de Sarre-Union : c’est Laurent Weinstein, désormais ex-président mais toujours investi dans une USSU reprise par Guy Irion, qui propose à Nizar de prendre la tête de l’équipe réserve, alors mal en point en Régional 2. Nulle hésitation : Nizar accepte de relever le défi, pour le coup pratiquement illusoire, de maintenir la « Deux » au septième échelon de la pyramide du foot français – une mission de « pompier de service ».

Bâtisseur de collectif

« Laurent m’a fait confiance, il m’a fait venir ; il y avait une nouvelle direction, c’était une période un peu particulière ». Comme le savent tous les suiveurs des Bleus, la direction de l’USSU avait essuyé quelques vents contraires à l’époque, au moment même où Nizar prenait du club son congé – qui n’avait donc rien de sabbatique.

Lorsque débute son deuxième cycle au sein du club phare de la Sarre, encore quelque peu ébranlé par cette période critique, le Sarrebourgeois perçoit pourtant déjà la remise d’aplomb et va apporter sa contribution, dans le périmètre de ses prérogatives d’entraîneur de la réserve, au rebond autant sportif que structurel de l’USSU assainie.

Avec Nizar, la réserve parvient à accomplir une deuxième partie de saison « exceptionnelle, avec un effectif très réduit. Finalement, on s’est sauvé avec des jeunes. Si on n’avait joué que la deuxième partie de saison, on aurait été deuxième, avec la même équipe » – une réussite accomplie alors qu’aucun objectif particulier n’avait été assigné à Nizar pour son retour.

Cette performance a permis de « relancer les choses », souligne l’homme qui s’est ensuite attaché à façonner une équipe « un peu plus locale », c’est-à-dire en sollicitant notamment des joueurs que Nizar avait encadrés en école de foot, afin de « recréer une base ». C’était précisément l’objectif qu’il s’était lui-même fixé en acceptant la proposition de Laurent Weinstein :

« Il y avait déjà eu une base avec des joueurs du coin mais qui étaient partis, peut-être parce qu’ils en avaient un peu marre d’être en équipe B – c’est un peu particulier, une équipe B.

Au fil des ans, on a réussi à rassembler des jeunes : un Maël Clisson, un Bastien Becker qui est resté quand je suis venu, un Tim Ercker qui a pris un peu de poids dans l’effectif, un Noyan Gungor… Sofiane Henrion vient de Sarrebourg… Cette année, Paul Roser, qui était là jusqu’en U15, nous a rejoints… Il y a aussi les frères Volkan et Berkant Topal, qui avaient été les premiers à nous rejoindre… J’en oublie ! Mais voilà, on a réussi à recréer quelque chose alors que c’était un risque, de jouer en R2 avec de très jeunes joueurs, qui peuvent parfois commettre des erreurs un peu évitables et ne sont pas encore tout à fait matures sportivement, alors que le niveau R2 a beaucoup progressé ces dernières années.

Face à des seniors aguerris, tu peux parfois voir la différence, malgré l’envie. On m’avait pris un peu pour un fou à la base et finalement on s’est maintenu à chaque fois et j’espère qu’on se maintiendra cette saison ! Ce n’était pas trop l’habitude du club où, souvent, des joueurs de la Une descendaient dans la Deux ; là, on a créé une ossature d’équipe B – on a inversé le rapport.

Bien que, cette saison, avec le choix d’avoir un gros effectif en équipe une, on ait plus souvent des joueurs de la Une qui complètent l’effectif, tout en gardant une ossature “locale” – l’équipe B étant plus “locale” que la Une” –, ça nous semblait important de donner de la place aux gars du coin, dans leur club – parce que ça reste leur club –, et, de ce point de vue-là, ça a été plutôt une réussite même si on est un peu plus en difficulté ces derniers temps. On tirera le bilan total en fin de saison mais je ne suis pas mécontent d’avoir pu un peu donner les clés de l’équipe aux gars du coin. »

Un bilan qui marquera le terme des responsabilités de Nizar à la tête de cette réserve au collectif de laquelle il a su insuffler une identité propre, indéniablement un atout pour le club qu’il s’attache également à accompagner activement dans sa stratégie et son projet sportifs :

« Lors de mon premier passage, j’avais mis un point d’honneur à ne pas trop me mêler de tout ce qui était senior – parce que c’est ce qui n’avait pas matché au FC Sarrebourg – et à faire mon job sur les jeunes. Je me consacrais à ça et le reste, je le regardais de loin. À mon deuxième passage, c’était le contraire : je me suis investi de plus en plus, d’année en année, avec tout ce que ça comporte ! »

Nouveau défi, nouveau rôle

En devenant manager sportif de l’USSU après trois ans et demi à la tête de l’équipe réserve, Nizar Mabsout ouvrira son troisième cycle au sein du club, « un vrai nouveau cycle avec un nouveau rôle », un rôle qu’il prendra assurément à cœur :

« Je suis assez excité par la tâche parce que c’est nouveau et parce que c’est une période particulière pour Sarre-Union. Il faut savoir que c’est un vrai risque – les gens ne s’en rendent peut-être pas compte – parce qu’on est dans une période de refonte des championnats seniors, avec encore cinq descentes à chaque fois les deux prochaines années. Avec quinze équipes qui descendront au final et les reléguées de N2, se maintenir deux ans de suite, ce sera comme une montée.

On ne se fait pas d’illusions parce qu’on a bien compris que, les petites villes comme Sarre-Union, on veut les faire descendre sur de la R1 – ce qui serait des super-R1 vu le nombre d’équipes qui vont descendre. Après, on va jouer crânement notre chance pour patauger là-dedans tout en restant ambitieux, parce qu’on a toujours été un club ambitieux.

Cette saison, les joueurs s’étaient fixés pour objectif de regarder en haut – il ne va pas manquer grand-chose, je pense, on a un peu manqué de régularité, peut-être. Mais, quand on est dans ce monde-là, on sait que chaque année est différente et ça, je l’ai très bien intégré depuis que je suis ici.

C’est pour ça que j’aime ce club, aussi ! J’étais toujours surpris quand on me disait au début “si on doit descendre, on descend”, alors que la plupart des clubs ont une phobie de ça, de la sanction sportive ! Ici, ils assument tout. C’est fascinant. »

À vrai dire, Nizar aurait déjà pu endosser sa nouvelle responsabilité en 2022 mais le temps n’était pas venu, foi de bâtisseur :

« L’année dernière déjà, Guy Irion m’avait demandé de prendre ce rôle mais j’avais refusé parce que je voulais terminer le cycle que j’avais entamé. J’ai toujours fait des cycles de trois, quatre ans avec toutes les équipes que j’ai eues. Après, je pense qu’il faut changer le coach ou les joueurs – entendre toujours le même discours… C’est pas trop mon truc de rabâcher, répéter, etc. »

Après trois ans et demi, donc, de « R2 », l’heure a désormais sonné :

« Là, je pense que j’atteins mes limites avec ce groupe, dans le sens où je les ai peut-être un peu surprotégés parce que ce sont des jeunes, que je leur ai laissé la place dans l’équipe, qu’ils entendent toujours la même chose – ils savent quand je râle, quand je m’énerve ou quand je suis plus cool !

Or ils ont besoin aussi, pour leur évolution, de voir autre chose, et moi également, parce que trois, quatre ans en équipe 2, ce n’est pas facile : tu passes un petit peu après, même si c’était très valorisant parce que je n’avais jamais entraîné à ce niveau-là, qu’il fallait reconstruire, pratiquement à partir de rien puisqu’on était quasiment en R3. Je pense avoir fait le tour.

La proposition que j’avais refusée l’année dernière s’est représentée cette année et va me permettre de voir autre chose, une autre facette du foot – même si, à l’EFT, je faisais un peu tout, j’avais déjà ce rôle de manager général mais c’était un club de moindre dimension, c’est une évidence ».

« Les choses se font naturellement »

Nul ne peut dire si le cycle qui s’ouvre sera triennal, quadriennal ou autre mais il est d’ores et déjà acquis qu’il s’inscrira dans la continuité du travail entrepris depuis plus de trois ans au club désormais présidé par Charles Hamm.

La fonction qu’occupera Nizar Mabsout s’était effacée avec le départ de Roudy Keller en 2019, « un personnage historique du club qui avait cette fonction sur les dernières années », suppléée après une période de tâtonnements par une petite cellule qui s’occupait de manière collégiale de tous les aspects sportifs.

« Il y avait eu une vraie saignée après le départ de Stéphane Léoni [en mai 2020] et avant l’arrivée de Sébastien Meyer, une vraie fin de cycle, un tournant financier d’abord puis un tournant sportif avec les départs d’historiques comme Vianney Schermann, Thomas Zerbini, Martial Riff, Jean-Philippe Djé, des monuments sportifs ici. Avec Guy Irion, et ce sera la même chose avec Charlot Hamm maintenant, on a eu et on a la chance d’avoir une présidence qui ne se mêle pas du sportif. Mais, au début, on n’avait peut-être plus, entre l’équipe et le comité, l’interface pour, tout simplement parfois, avoir les bonnes infos et faire les bons choix. »

Nizar salue la responsabilité de Guy Irion d’avoir reconnu la nécessité de réinstituer cette courroie de transmission indispensable à la cohésion des acteurs de la locomotive du club – courroie doublée d’une force de prospection sur le recrutement. Nizar salue également le choix d’Éric Cortinovis, initialement adjoint de Léoni, d’avoir poursuivi l’aventure à Sarre-Union, ce qui avait motivé plusieurs joueurs à en faire de même, avant que Sébastien Meyer ne ramène aussi du monde avec sa prise de fonction et son réseau.

Quant à la crise du Covid, elle aura, en fin de compte, permis « à tout le monde de souffler : ça nous a fait du bien parce qu’on était vraiment dans une période charnière, avec peu de visibilité, et derrière on a pu repartir sur un vrai cycle ».

« De manière collégiale, on a fait de belles choses, je crois », analyse celui qui fut membre de ce « collège » au moment d’en prendre, en quelque sorte, le pilotage – loin de toute forme de melon :

« Je vais continuer à travailler avec le petit groupe qu’on était tout en cherchant à imprimer ma façon de faire. Ce qui est déjà un peu le cas parce que, dans les réunions, ils ont vu que je n’hésitais pas à me positionner. Je pense que l’idée de me confier la tâche est venue de ça ; les choses se font naturellement ».

Si la méthode collégiale a ses vertus, il n’en reste pas moins que, parfois – et le club en a « besoin, sans doute » –, « il faut trancher ». Le management de Nizar s’inscrira dans la continuité tout en apportant sa vision, notamment sur « le lien avec l’équipe », « essentiel » pour assurer la stabilité de l’effectif et du club en général, au-delà du sort des hommes.

Les nombreux départs consécutifs à celui de Stéphane Léoni avaient pu, à ce titre, révéler une certaine fragilité à laquelle le rôle de manager sportif doit précisément permettre de remédier.

Nizar s’attachera à agir dans le respect des prérogatives de chacun – un trait qui fait, entre autres, le caractère du club – tout en ayant un œil attentif à la transition jeune/senior, comme il le faisait d’ailleurs déjà en tant que coach de la réserve et fort de la connaissance des équipes jeunes, sachant qu’il voit dans les difficultés que peut rencontrer le club par rapport à cette transition l’un des axes de progrès structurants pour l’USSU.

Il explique ces difficultés notamment parce que, « souvent, la marche peut être trop haute, et certains préfèrent passer d’abord par d’autres clubs avant de revenir ; si on arrivait à perdre un peu moins de temps, ce serait bien aussi ».

Quelles que soient les apparences, un club de foot est toujours intrinsèquement « très fragile », comme on le voit actuellement avec Vauban ou Schiltigheim ou comme cela a pu être le cas il y a quelques années à l’USSU ; il faut dès lors agir en fédérateur, en prenant en compte les compétences, atouts et caractères de chacun dans ce qui est donc, aussi, une grande famille.

La poursuite du maintien du standing de l’USSU, un défi pour une ville de 3000 habitants malgré sa stature de bourg-centre de bassin de vie, peut s’appuyer sur ce qui fait précisément l’âme et la force de ce club : l’implication et l’engagement sans compter de ses acteurs et de l’environnement. Un standing qui ne relève pas du « miracle, quand tu vois le boulot qu’ils abattent ; ils font les choses pour ça – on a ce qu’on mérite ! Ça force le respect ! »

Nizar peut faire la comparaison avec le FC Sarrebourg qui, depuis sa rétrogradation de N3 en 2001, « n’a jamais trouvé les ressorts pour remonter », alors qu’il s’agit d’une ville quatre fois plus importante que Sarre-Union, avec un bassin de vie plus vaste et des infrastructures de sous-préfecture. « Il y a tout ce qu’il faut là-bas mais ils n’ont jamais réussi à le refaire tandis qu’ici, ils tiennent le coup, avec ce passage en N2 qui a marqué l’histoire du club, quelques aventures fabuleuses en Coupe de France ; ils ont construit leur histoire et c’est beau. »

Une stratégie fondée sur l’engagement

Sur la stratégie qu’il entend adopter dans son nouveau rôle, Nizar Mabsout agira en garant du subtil dosage qui fait non seulement la culture mais aussi l’attractivité de l’USSU : « rassembler des gars de loin pour créer quelque chose ici ». Le futur manager sportif détaille :

« C’est vrai que le club a toujours fait un peu de post-formation. Il y a une tradition, avant même que le club ait été en championnat national, à faire une équipe une avec des joueurs qui viennent de loin.

Historiquement, c’est ancré : l’équipe une, c’est la vitrine. Je sais bien aussi, par mon parcours au sein du club, que cet aspect a pu être critiqué, notamment par quelques parents pouvant se plaindre qu’il n’y en aurait que pour l’équipe une. Mais, en fait, on atteignait juste nos limites en termes d’attractivité des jeunes quand le club est arrivé en Excellence.

Pour passer le cap, il aurait fallu investir dans des coaches encore plus performants mais on aurait enlevé le pain à ceux qui avaient permis au club de monter et ce n’est pas dans la culture du club, par rapport à l’école de foot. Donc, pour les seniors, on a toujours fait un peu de post-formation. Des coups, aussi : c’est un club qui a aussi toujours pris des risques au niveau du recrutement.

Il y a de très bons joueurs qui sont passés par ici, des mecs qui ont rebondi plus haut, des trouvailles, des gars du coin aussi comme Vianney Schermann qui avait atteint un gros niveau à un moment donné alors qu’il venait de Hommert, près de Sarrebourg. Il y a cette culture.

Alors, il y avait quelques ciments et ça va être toute la difficulté de retrouver des ciments du groupe – il y en a qui tournent mais il y en a qui restent : ce noyau, il est à construire encore. Avec des mecs du coin qui pourraient durer ici ».

Maître-mot, toujours : l’engagement. Une valeur fondamentale, commune à l’USSU et à Nizar Mabsout :

« J’ai mis un point d’honneur à respecter tous mes engagements dans le foot, même si, parfois, je les ai pris un peu vite ! Quand je suis arrivé à l’USSU, c’était parce que je pensais que j’arrêtais à l’EFT, mais l’EFT m’a demandé de continuer et c’est vrai que je m’étais un peu engagé verbalement. Alors j’ai dit, ok, je fais les deux ! »

L’engagement, c’est une valeur que Nizar souhaite aussi, naturellement, pour l’équipe première, « des gens qui s’engagent vraiment pour le club. » Ce qui ne veut pas dire que ce n’est pas déjà le cas, encore faut-il en réunir les conditions :

« Je sais que le monde du foot est rude, je l’ai découvert ces deux dernières années : tout n’est pas rose, on peut avoir l’impression parfois que certains joueurs viennent en mercenaires pour l’argent ou leur propre intérêt, mais je considère que c’est au club de leur donner envie de s’engager et de durer ici.

C’est à nous de créer les conditions pour que ça arrive. C’est déjà arrivé dans le passé, avec Amara Keita qui est le symbole de ce passé récent et de ce présent, qui est un monument ici. Faire d’autres Amara Keita – qui a fait le centre de formation à Nancy et qui a maintenant trouvé son bonheur ici –, je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas possible. Je ne suis pas de ceux qui fuient leurs responsabilités : on doit mettre les conditions pour que ça se fasse et on sanctionnera si ça doit mal se passer.

L’engagement, donc, mais aussi parce que je suis un compétiteur : le but, à la fin, c’est d’être bon et de gagner ».

Fort de sa connaissance du vivier de la région, renforcée par celle du réseau de Sébastien Meyer, Nizar lorgne aussi sur Strasbourg – un peu moins sur Metz :

« Il y a une attractivité forte pour le club de Sarre-Union. On peut s’étonner du nombre de joueurs qui nous sollicitent chaque année et auxquels on ne donne pas suite ! Le tout, c’est d’aller chercher des gars que, nous, on veut.

Le job, il est là, surtout, pour passer l’étape où on a eu un petit battement. On a pris des gros risques ces dernières années, certains ont été de franches réussites, d’autres moins, mais c’est le foot. Elvis Delgado, il est venu par la petite porte et il est aujourd’hui un titulaire indiscutable de l’équipe.

C’est beaucoup au réseau, et aux matches qu’il faut aller voir – j’ai déjà commencé à aller voir des matches de N3 pour identifier, regarder, voir ce qui se fait. C’est le début, on va dire : j’ai encore tout à apprendre là-dedans ! »

Un tournant sportif à la hauteur de l’homme qui aime la droiture et l’humilité autant que l’ambition et la réussite collectives :

« C’est aussi ce que j’aime à l’USSU : ici, on te dit oui ou non, il n’y a pas de zigzag, on ne fait pas semblant : c’est oui ou c’est non, et puis on avance. J’ai beaucoup d’humilité par rapport à ce que font les gens ici. J’ai envie de les aider à réussir, aussi à titre personnel. Je me suis mis naturellement au service du club parce que c’est comme ça que je vois les choses.

Ma position de décideur, ça ne va pas être de donner sa direction à chacun mais de faire en sorte que ça marche, pour eux.

J’aime l’associatif, j’aime le contact avec les joueurs et j’aime quand on avance. Jamais, je ne serai un boulet : si, à un moment donné, je sens que je dois laisser ma place, je la laisse – c’est ce que j’avais fait à l’EFT malgré les sollicitations pour que je reste mais je ne me voyais pas m’approprier un club. »

Conclusion limpide : « J’ai juste envie d’être le mec qui fait les choses qu’il doit faire. Le but, c’est de rassembler autour d’un projet qu’on va façonner ensemble ».

Interview réalisée par Raphaël Heyer pour l'US Sarre-Union.

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